(Yabiladi)
La RAM a des raisons de se réjouir. En plus d’afficher des perspectives de croissance optimistes pour l’année 2012, la compagnie aérienne marocaine est en train d’assister, depuis plusieurs semaines, à la chute, tour à tour, de ses plus féroces concurrentes : les compagnies aériennes low-cost. Après plusieurs années de stratégie commerciale, ces dernières ont en effet initié, depuis avril dernier, une série de programmes visant à réduire leur voilure sur le Royaume, et ce, afin de diminuer leur frais et/ou de rééquilibrer leur compte dans le rouge.
Premières à avoir initié ce mouvement de retrait, les deux compagnies leaders du transport aérien, l’irlandaise Ryanair et la britannique Easyjet, qui représentent à elles seules près de 55% de l’offre globale au Maroc. Alors que fin juin, Ryanair annonçait une suppression de 34 vols hebdomadaires à partir du et vers le Maroc, Easy Jet lui emboitait le pas moins de deux semaines après en annonçant à son tour la suspension de plusieurs vols à destination et en provenance du Maroc. Raison invoquée par les deux compagnies pour justifier ce retrait progressif? La hausse présumée des taxes aéroportuaires décidée unilatéralement par l’Office National Des Aéroports (ONDA). Une accusation que dément aujourd’hui formellement l’office : « Il n’y a eût aucune hausse des taxes appliquées. Au contraire les mesures incitatives qui devaient prendre fin cette année ont été reconduites jusqu’à fin 2013 dans tous les aéroports » assure l’ONDA à L’Économiste.
La stratégie de « prédation commerciale » se retourne contre le low-cost
Pour la RAM, accusée par les deux compagnies d’exercer un monopole au niveau du handling, la véritable raison de la réduction progressive de la voilure d’Easyjet et de Ryanair au Maroc est en grande partie à imputer à la stratégie de « prédation commerciale » que ces dernières pratiquent depuis leur arrivée dans le Royaume selon l’Economiste. « Vous ne pouvez pas continuer indéfiniment à vendre à un prix inférieur à votre prix de revient » relève Abderrafiaa Zouiten, directeur général exécutif de RAM. Pour le DG de la compagnie nationale, ces entreprises se sont faites prendre à leur propre jeu en tentant de tirer outrancièrement les prix vers le bas dans la mesure où elles ont obligé les compagnies régulières, telle que la RAM, à revoir leur prix à la baisse – ce que ces dernières ont fait. Or, les passagers marocains ayant une préférence de cœur pour leur compagnie nationale, il est devenu de plus en plus difficile pour les low-cost de remplir leurs avions.
A cette concurrence pleine de ressort s’est ajouté le durcissement de la crise économique internationale qui s’est traduit, dans les faits, par une baisse de la demande touristique mondiale, une hausse des prix du baril de pétrole et un assèchement progressifs des diverses aides et subventions versées par l’Europe aux compagnies low-cost. Autant de facteurs qui, lorsque combinés, explique le recul net de l’activité enregistrée par celles-ci au cours des derniers mois.
Les compagnies low-cost marocaines connaissent, elles aussi, des déboires
Ceci étant dit, les spécialistes du « moindre coût » européens ne sont pas les seuls à avoir subi de plein fouet les relents de la crise internationale. Depuis plusieurs mois, les low-costs marocaines – à l’instar de Jet4You ou d’Air Arabia – mangent elles aussi leur pain noir. Ne cessant de cumuler les déficits depuis leur implantation au Maroc, ces dernières ont dû récemment fermé de nombreuses lignes pour répondre au recul de leur activité dans le ciel marocain.
Jet4You, pour commencer – qui n’existe plus sous ce nom depuis qu’elle a été ravalée en mai dernier par sa maison-mère, la belge Jet Air Fly –, a supprimé de nombreuses liaisons entre le Maroc et l’étranger depuis trois mois. Son absorption par la filiale de TUI a d’ailleurs été le premier tintement du glas des compagnies européennes (Ryanair et Easyjet) au Maroc.
Air Arabia n’a pas elle non plus été épargnée par la crise qui touche le secteur du transport aérien. La compagnie marocaine, qui connait des déboires financiers depuis 2011, aurait, d’après l’Économiste, essuyé des pertes sèches s’élevant à quelques 270 millions de DH l’an passé. Si cette dernière a pu résister indique le journal, c’est grâce à une augmentation à hauteur de 125 millions de DH de son capital. Sans cela, l’avenir de la compagnie crée en avril 2009 aurait été définitivement compromis.
La RAM: grande gagnante de la crise qui touche le low-cost
La réduction de la voilure des compagnies aériennes à bas prix au Maroc a plusieurs conséquences, directes et indirectes : la première est que l’offre sur le Maroc devrait baisser de 20% en 2012, la capacité « passager » passant de 8 millions (2011) à 6,5 millions de personnes. La seconde conséquence, indirecte, est que la suppression de ces nombreuses dessertes pourrait coûter des touristes au Maroc (l’estimation du « coût passager » de la suppression des 34 vols de Rayanair se chiffre à 100 000 touristes), ce qui, ipso facto, se traduirait en bout de ligne par un manque à gagner de plusieurs dizaines de millions d’euros. Enfin, la troisième conséquence, découlant directement des deux premières, est le fait que la RAM, malmenée pendant toutes ces années par les low-cost, pourrait enfin prendre le relais. A ce propos, l’ONMT (Office National Marocain du Tourisme), précise l’Economiste, serait actuellement entrain d’évaluer l’opportunité de rouvrir certaines lignes à fort potentiel pour le développement du tourisme. Comme quoi, le malheur du low-cost risque bel et bien de faire le bonheur de la RAM.